Quantcast
Channel: Thomas Sankara – le monde à l'ENVERS
Viewing all articles
Browse latest Browse all 38

COMPAORÉ sur l’EXÉCUTION d’HENRI ZONGO et de LINGANI : « Je n’ai pas à avoir pitié des traîtres » P.1

$
0
0

Burkina Faso's President Blaise Compaore waits prior to meeting relatives and acquaintances of the victims of the Air Algerie crash at the Presidential Palace in Ouagadougou on July 26, 2014. The second black box from the Air Algerie plane disaster was recovered on July 26 at the remote crash site in northern Mali as investigators headed to the scene to determine the cause of the tragedy. Compaore met on July 26 with relatives of some crash victims in Ouagadougou and announced that Burkina Faso has opened an official inquiry into the cause of the disaster. AFP PHOTO/ SIA KAMBOU

Le document ci-après est extrait du magazine Jeune Afrique daté du 30 octobre 1989. Il nous a été remis (en version photocopiée) par un doyen, aujourd’hui, à la retraite, un inconditionnel de L’Ouragan qui l’a gardé soigneusement pour l’Histoire, pour la génération future comme preuve d’atteinte grave aux droits humains sous le long et inutile règne du vampire Blaise Compaoré et de son chef tortionnaire Gilbert Diendéré. C’est une interview que le capitaine Blaise Compaoré avait accordée à notre confrère Jeune Afrique au lendemain de l’ignoble assassinat du commandant Jean-Baptiste Boukary Lingani et du capitaine Henri Zongo. (…). Blaise Compaoré, ex-homme fort du Burkina Faso, donne ici sa version des faits avec une arrogance et une insouciance à vous donner des nausées. Lisez plutôt ce document que nous vous proposons en deux (02) parties. Ci-dessous la première partie.

Jeune Afrique : Pourriez-vous nous éclairer sur les conditions, demeurées jusqu’ici obscures, dans lesquelles furent exécutés vos deux anciens compagnons, Jean-Baptiste Boukary Lingani et Henri Zongo ?

Blaise Compaoré (BC) : Ces gens ont reconnu leur forfait. Ils ont été passés par les armes. C’est tout. Il n’y a pas autres éclaircissements à apporter.

Comme ces deux officiers n’étaient pas n’importe qui, dans la mesure où ils occupaient respectivement la deuxième et troisième place dans la hiérarchie de votre régime, il est tout de même difficile de voir qu’ils ont été exécutés sans que vous ayez eu votre mot à dire.

B.C. : Quand j’ai regagné Ouagadougou dans la soirée du 18 septembre, Lingani n’était pas arrêté.

Donc vous l’avez vu ce soir-là ?

B.C : Non, il était en fuite.

Lorsqu’il a su que son complot avait été découvert et qu’on venait l’arrêter, il a sauté par la fenêtre de son bureau. Pour aller se cacher en compagnie d’un de ses gardes du corps. A quel moment a-t-il pris la fuite ?

B.C. : Aux alentours de 17heures, je crois. Je n’étais pas encore arrivé.

A quel moment le commandant Lingani a-t-il été arrêté?

B.C. : Tard dans la nuit, je crois.

Et le capitaine Henri Zongo ?

B.C. : Lui, je crois qu’il était parmi ceux qui étaient venus m’accueillir à l’aéroport. Ce dont je suis sûr, c’est que Zongo était présent à la réunion organisée en vue de m’expliquer ce qui avait été tramé contre moi. D’ailleurs, il était assis à côté de moi pendant cette réunion.

Vous avez dit par ailleurs que vous ne savez pas comment vos deux anciens compagnons ont été exécutés.

B.C. : De toute façon, une fois arrêtée je ne pense pas qu’ils méritaient d’autres sanctions que l’exécution.

A supposer qu’ils aient été coupables de tentative de coup d’Etat, ils n’avaient pas eu le temps de mettre leur plan à exécution. Ce qui aurait pu constituer des circonstances atténuantes.

B.C. : ça, c’est votre point de vue. Pour ma part, je trouve qu’il est tout à fait normal qu’on leur applique le sort qu’ils avaient réservé aux autres.

Mais êtes-vous convaincu de leur culpabilité ?

B.C. : Du moment qu’ils ont reconnu eux-mêmes leur forfait, et ce sans contrainte d’aucune sorte, je n’ai pour ma part aucun doute là dessus.

Mais concrètement qu’ont-ils fait ? Ont-ils contacté des soldats, rassemblé des armes ou monté une opération précise ?

B.C. : Lingani était à la fois Chef d’état-major des armées et ministre de la Défense nationale. De part ces deux fonctions, il n’a pas à contacter des soldats ou à rassembler des armes. Pour faire le mal il suffisait tout simplement d’en prendre la décision. C’est ce qu’il a fait, il l’a reconnu.

Mais personne n’a vu les preuves de cette accusation.

B.C. : Nous avons des preuves irréfutables. Nous avons trouvé une liste de complices. Nous aurions pu la rendre publique. Si nous ne l’avons pas fait c’est parce que nous ne voulons pas faire tomber d’autres têtes. Mais la liste existe : elle est de la propre main de Lingani.

C’est tout ce que vous avez trouvé ?

B.C. : En plus de cette liste, nous avons trouvé un autre manuscrit de Lingani où il indiquait les mesures à prendre aussitôt après le coup d’Etat. (Blaise Compaoré nous alors brandi le bout de papier).

Devant quel tribunal Lingani et Zongo ont-ils été jugés ?

B.C. : Ils l’ont été jugé par un tribunal militaire autour duquel et pour des raisons de sécurité, nous n’avons pas voulu faire de publicité. Mais sachez que c’est un véritable tribunal militaire.

Ont-ils pu se défendre ?

B.C: Bien sûr. C’est ainsi d’ailleurs qu’ils ont fait les aveux enregistrés sur bandes magnétiques.

Des aveux sur une bande ne sont pas si convaincants …

B.C. : Eh bien, je peux vous dire qu’au Burkina les gens les ont crus, parce que tout le monde a reconnu les voix de Lingani et de Zongo.

Mais nul ne sait dans quelles conditions ces aveux ont été obtenus.

B.C. : Je vous assure que ces aveux n’ont pas été obtenus sous l’effet de la contrainte ou de la torture comme certains pourraient l’imaginer. D’ailleurs cela ressort parfaitement des voix des deux traîtres. Ils parlaient sur un ton calme et totalement responsable.

Pourquoi avoir condamné à mort des comploteurs dont le dessein n’avait abouti à aucune effusion de sang ?

B.C. : Je n’étais pas moi-même au tribunal, mais je pense que les juges ont eu suffisamment d’éléments entre les mains avant de prononcer la sentence de mort. Et s’il est vrai que la tentative n’a pas occasionné d’effusion de sang, il ne faut pas perdre de vue que leurs auteurs avaient bel et bien l’intention, eux, de verser le sang.

Pourquoi avez-vous précipité leur exécution ?

B.C. : Dès lors qu’ils ont été condamnés à mort, il fallait les exécuter. Puisqu’il a été établi qu’ils étaient coupables, je ne vois pas pourquoi il aurait fallu surseoir à leur exécution.

En tant que chef de l’Etat, vous aviez la possibilité de gracier les condamnés à mort, ne serait-ce qu’en souvenir du long parcours politique que vous avez eu avec eux.

B.C. : Cela dépend de l’appréciation que le chef de l’Etat fait de l’acte en cause. Etant donné le caractère criminel de celui-ci puisqu’il s’agissait de la sécurité de l’Etat, je n’ai pas cru devoir accorder la grâce aux condamnés. Et j’ai pris cette décision en toute conscience.

L’exécution de deux compagnons aussi proches ne vous empêche pas de dormir ?

BC : Si ceux que vous appelez des proches compagnons étaient morts alors que nous partagions les mêmes convictions, oui ça aurait pu provoquer chez moi des insomnies. Mais dès lors qu’ils avaient cessé d’être de fidèles et sincères compagnons, au point d’avoir basculés dans la traîtrise, eh bien leur disparition ne m’empêche pas de dormir. Pas du tout, alors.

L’indifférence de la population ne vous inquiète pas non plus ?

B.C. : Ce que vous prenez pour de l’indifférence n’est en fait qu’un signe de maturité, la preuve, s’il en est besoin de l’esprit de responsabilité du peuple burkinabè. Du reste cette attitude prouve que le sort des comploteurs n’intéressait nullement le peuple. Car ils ne représentaient rien à ses yeux.

Cela peut vouloir dire aussi que la manière dont les équipes dirigeantes se succèdent au pouvoir n’intéresse plus le peuple ?

B.C. : Pas du tout. Le peuple connait et soutient la ligne et le programme du Front populaire.

Ne pensez-vous pas que le peuple soit désormais si écoeuré par les moeurs politiques en vigueur qu’il préfère se réfugier dans l’indifférence ?

B.C. : C’est tout à fait le contraire. Le peuple burkinabè est croyez moi, pleinement engagé dans le combat libérateur qu’incarne le Front populaire.

Mesurez-vous la gravité des événements du 18 septembre 1989 ?

B.C : Quelle gravité ? Rien n’a changé ! « J’affirme que les aveux de Lingani et de Zongo n’ont pas été obtenus sous la torture. Contrairement à ce que certains ont imaginé » Ici, ni dans la vie du peuple, ni au niveau des structures politique en place. Donc je ne vois pas à quoi vous faites allusion. Par contre, si le complot avait réussi, je vous concède que ç’aurait été très grave.

Parce que vous auriez été éliminé ?

B.C. : Non, pas du tout. Un révolutionnaire peut tomber à tout moment au champ d’honneur. Ce qui aurait été grave, c’est que la victoire des contre-révolutionnaires se serait traduite de notre révolution et de notre peuple.

Est-ce que vous mesurez à quel point ces exécutions ont terni l’image de votre pays. Pourquoi ne pas dire du continent africain tout entier.

B.C. : Je puis vous affirmer que l’image du Burkina et de l’Afrique aurait été plus ternie encore si le complot avait réussi.

Ne pensez-vous pas que ces événements servent indirectement vos ennemis ?

B. C. : Je ne me préoccupe pas tellement de savoir ce que pensent de moi mes ennemis qui sont après tout ceux du peuple burkinabè.

Ces événements rappellent étrangement ceux qui aboutirent à l’assassinat de Thomas Sankara, le 15 octobre 1987 (…)

Lire la totalité de la première partie



Viewing all articles
Browse latest Browse all 38

Trending Articles